Contes et légendes
Des histoires à raconter au coin du feu
Anatole Lambert raconte la légende
La légende de saint Nicolas
Cette ballade est un ancien cantique du XVe siècle, repris par Gérard de Nerval trois cents ans plus tard. Le poète, séduit par cette légende, en créa une nouvelle version mise en musique par Armand Gouzien.
Il était trois petits enfants
Qui s'en allaient glaner aux champs.
S'en vont un soir chez un boucher :
Boucher, voudrais-tu nous loger ?
Entrez, entrez, petits enfants,
Y a de la place, assurément.
Ils n'étaient pas sitôt entrés
Que le boucher les a tués,
Les a coupés en p'tits morceaux
Mis au saloir comme pourceaux.
Saint Nicolas au bout d'sept ans
Vint à passer dedans ce champ,
Alla frapper chez le boucher :
Boucher, voudrais-tu me loger ?
Entrez, entrez, saint Nicolas,
Y a de la place, il n'en manque pas.
Il n'était pas sitôt entré
Qu'il a demandé à souper.
Voulez-vous un morceau d'jambon ?
Je n'en veux pas, il n'est pas bon.
Voulez-vous un morceau de veau ?
Je n'en veux pas, il n'est pas beau.
Du p'tit salé, je veux avoir
Qu'il y a sept ans qu'est au saloir.
Quand le boucher entendit ça,
Hors de sa porte il s'enfuya.
Boucher, boucher, ne t'enfuis pas
Repens-toi, Dieu te pardonn'ra.
Le grand saint étendit trois doigts
Les trois enfants ressuscita.
Le premier dit : j'ai bien dormi.
Le second dit : Et moi aussi.
Et le troisième répondit :
Je croyais être au Paradis.
La légende des trois filles
Nicolas entendit un jour parler d’un homme qui avait perdu tout son argent. Ce dernier avait trois filles qui étaient en âge de se marier. Hélas, il n’avait pas assez de biens pour pouvoir payer leur dot. La nourriture commençait à manquer et cette famille s’enfonçait dans la pauvreté et c’est le cœur plein de tristesse que le père décida que les filles allaient être vendues en esclaves, elles ne pouvaient plus rester au foyer familial.
La nuit précédant leur départ, l’aînée lava ses chaussettes, les plaça devant le feu pour les faire sécher et alla se coucher avec le reste de la famille. Le lendemain matin, la famille découvrit que dans ses chaussettes était placée une bourse remplie d’or, assez d’or pour nourrir la famille et payer la dot de l’aînée. Comme ils étaient heureux !
Le jour suivant, un autre sac d’or fut découvert et c’est la dot de la sœur cadette qui allait pouvoir être honorée.
Ils se demandaient tout de même qui pouvait être aussi généreux pour leur donner une telle somme sans rien réclamer en retour. La nuit suivante, persuadé que l’opération allait être renouvelée, le père décida de se cacher et d’observer ce qui se passait dans la pièce. Cela faisait des heures qu’il attendait caché et la fatigue commençait à l’emporter, quand, soudain, un bruit le ramena à la raison, un petit clic accompagna la chute d’un sac d’or, tombant dans la pièce. Rapidement, le père sortit de la maison et se rendit près de la fenêtre où était apparu le sac, et qui trouva-t-il ? Oui, c’était bien saint Nicolas.
Il lui dit : « Nicolas, est-ce toi ? Merci pour ton aide, je ne sais comment te remercier ». Saint Nicolas répondit « s’il te plaît, ne me remercie pas, remercie Dieu d’avoir exaucé tes prières ». Puis il lui demanda de ne raconter cette histoire à personne et disparut. L’homme ne tint pas ses promesses, car le lendemain, toute la ville en fut informée et le bruit se répandit en peu de temps dans toute la province.
L’homme put marier ses filles et toute la famille fut heureuse.
Depuis, la coutume veut que les jeunes filles qui cherchent un mari s’adressent à saint Nicolas pour qu’il guide leur choix. Est-ce qu’il les entendra ?
La légende du sauvetage en mer
Un jour où saint Nicolas se rendait en pèlerinage en Terre Sainte, il rencontra un marin et lui prédit qu’une horrible tempête allait se lever en mer. La prédiction se révéla juste. Le marin qui se trouvait sur son bateau avec tout son équipage fut pris dans le mouvement tumultueux des flots. La tempête fut si puissante que tous les passagers se crurent perdus ; mais Nicolas rendit le calme à la mer et les personnes à bord furent sauvées.
Depuis ce jour, les marins ont choisi saint Nicolas comme patron de leur corporation. Lorsque la tempête se lève et qu’ils se sentent en danger, ils demandent au saint de veiller sur eux.
Saint Nicolas est le saint patron des bateliers, pêcheurs, marins et mariniers, déchireurs de bateaux et débardeurs.
Le conte de l'enfant brûlé vif
Un jour, une femme présenta à saint Nicolas son enfant, qui, tombé dans le feu, avait perdu la vie. Faisant sur lui le signe de la croix, Nicolas le ressuscita en présence de toute l’assemblée.
Depuis, il est de coutume d’implorer saint Nicolas dans les accidents du feu.
Le conte du vase d'or
Un noble avait prié saint Nicolas de lui faire obtenir un fils, promettant qu’en récompense, il se rendrait avec son fils au tombeau du saint et lui offrirait un vase d’or. Le noble obtint un fils et fit faire un vase d’or. Mais ce vase lui plut tant qu’il le garda pour lui-même et, pour le saint, en fit faire un autre d’égale valeur.
Il s’embarqua avec son fils pour se rendre au tombeau de saint Nicolas. En route, le père ordonna à son fils d’aller lui prendre de l’eau dans le vase qui d’abord avait été destiné à saint Nicolas. Aussitôt, le fils tomba dans la rivière et se noya. Mais le père, malgré toute sa douleur, n’en poursuivit pas moins son voyage.
Parvenu dans l’église de saint Nicolas, il posa sur l’autel le second vase. Au même instant, une main invisible le repoussa avec le vase, et le jeta à terre. L’homme se releva, s’approcha à nouveau de l’autel et fut de nouveau renversé.
Et voilà qu’apparut, au grand étonnement de tous, l’enfant qu’on croyait noyé. Il tenait en mains le premier vase, et raconta que, dès qu’il tomba à l’eau, saint Nicolas vint le prendre, et le conserva sain et sauf. Sur quoi, le père, ravi de joie, offrit les deux vases à saint Nicolas.
Le conte de l'enfant esclave
Un homme riche avait obtenu, grâce à l’intercession de saint Nicolas, un fils qu’il avait appelé Dieudonné.
Aussi, il avait construit, en l’honneur du saint, une chapelle dans sa maison où il célébrait solennellement sa fête tous les ans. Or, un jour, Dieudonné fut enlevé par la tribu des Agaréniens et amené en esclavage au roi de cette tribu.
L’année suivante, au jour de la Saint-Nicolas, l’enfant qui servait le roi d’une coupe précieuse en mains se mit à pleurer et à soupirer en songeant à la douleur de ses parents et en se rappelant la joie qu’ils éprouvaient naguère à la Saint-Nicolas.
Le roi l’obligea à lui confesser la cause de sa tristesse puis lui dit : « Ton Nicolas aura beau faire, tu resteras ici mon esclave ! » Mais au même instant, un vent terrible s’éleva, renversa le palais du roi et emporta l’enfant avec sa coupe, jusqu’au seuil de la chapelle, où ses parents étaient en train de célébrer la fête de Saint-Nicolas.
Le conte du bâton d'or
Un homme avait emprunté de l’or à son voisin, mais ne lui rendit jamais. Cette affaire fut suivie devant un juge qui demanda au redevable ce qu’il attendait pour rendre l’argent. L’homme lui assura qu’il avait déjà honoré sa dette.
Mais cet emprunteur malhonnête fut bien puni de son mensonge, car en sortant de chez lui, un chariot l’écrasa et brisa le bâton avec lequel il marchait. De cet objet sortirent une multitude de pièces d’or. Le prêteur, qui se trouvait non loin de la scène, était un homme bon et implora saint Nicolas de redonner la vie au mort.
Nicolas exhaussa ses prières et ressuscita l’homme qui se repentit aussitôt.
De saint Nicolas au Père Noël
Après la Réforme protestante survenue au XVIe siècle, la fête de Saint-Nicolas fut abolie dans certains pays européens. Les Hollandais conservèrent cependant cette ancienne coutume catholique. Ainsi, les petits Néerlandais continuèrent de recevoir la visite de Sinterklaas (Saint-Nicolas) la nuit du 6 décembre.
Au début du XVIIe siècle, des Hollandais émigrent aux États-Unis et fondent une colonie appelée New Amsterdam, renommée New York à partir de 1664. Quelques décennies suffisent pour répandre sur le continent américain cette coutume néerlandaise de fêter la Saint-Nicolas. Sinter Klaas devint rapidement Santa Claus.
Ce donateur attentionné, représenté sous l’aspect d’un vieillard à barbe blanche, portant un long manteau à capuchon ou parfois même des habits épiscopaux, demeurait néanmoins un personnage moralisateur. Il récompensait les enfants méritants et punissait les ingrats et dissipés. Après plusieurs décennies, la société chrétienne trouva plus approprié que cette « fête des enfants » soit davantage rapprochée de celle de l’enfant Jésus. Ainsi, dans les familles chrétiennes, saint-Nicolas fit désormais sa tournée la nuit du 24 décembre. Quant au changement de couleur de son habit de vert à rouge entre saint Nicolas et le Père Noël, l’explication est simple : une célèbre marque américaine de soda a dessiné ce vieillard en habit de la couleur représentant sa boisson pour une publicité au début du XXe siècle ; depuis, tout le monde l’a adoptée.
Dans l’Est de la France, le culte de saint Nicolas et le pèlerinage à Saint-Nicolas-du-Port étaient très populaires dès le Moyen-Age. Au XVIe siècle, les réformistes, pour détourner cette ferveur populaire, privilégièrent l’image du Christkindel, de l’Enfant Jésus.
Au Canada, pour les francophones catholiques, c’était également l’Enfant Jésus qui venait garnir le bas de Noël des enfants, la nuit du 25 décembre, alors que saint Nicolas s’occupait des petits anglophones. Le Christkindel et saint Nicolas resteront les deux principaux donateurs de cadeaux au lendemain de la première guerre mondiale.